2018, l’année de la camionnette familiale
Cette année, pas moins de six ludospaces sont renouvelés ou restylés. Si ce type de voiture continue de se vendre gentiment, la raison de cette renaissance n’est pas à rechercher dans un succès fulgurant attendu prochainement. Ces modèles sont moins chers à développer que d’autres et peuvent, le cas échéant, servir de chaînon manquant.
C’est une première : en cette seule année, les six ludospaces les plus vendus dans l’Hexagone subissent une cure de jouvence. Les cousins Peugeot Rifter, Citroën Berlingo et Opel Combo Life ont été dévoilés, le Ford Tourneo Connect a subi un ravalement de façade en début d’année, et le Renault Kangoo nouveau sera présenté au Mondial à la rentrée. Quant à son frère de sang, le Mercedes Citan, il devrait apparaître sur les écrans radars dans la foulée.
Mais que se passe-t-il au pays de la camionnette familiale pour que toute l’armada des marques se précipite au même moment ? Une volonté des constructeurs de proposer une alternative aux SUV ? Le souhait de remplacer les monospaces ? Une opportunité économique ? Si la fin des autos hautes sur pattes n’est pas pour demain, les deux autres raisons se rapprochent de la vérité.
De la 2ch fourgonnette de Citroën au Peugeot Rifter
Les marques n’ayant aucune vocation philanthropique, concevoir des autos au coût de développement le moins cher possible est une obligation. Et dans ce domaine, le ludospace est imbattable. Car son origine est utilitaire depuis la 2ch fourgonnette préhistorique de Citroën, suivie de la R4 fourgonnette Renault.
Des autos d’artisans que les jeunes d’alors se sont appropriés pour y faire l’amour plutôt que la guerre, se fichant du manque de banquette, et de porte arrière, comme de leur premier bâton d’encens. Des jeunes et leur progéniture, peut-être conçue à bord, qui ont grandi et réclamé un minimum de confort. C’est Renault qui leur offrira d’abord une banquette arrière à bord de l’Express, dérivé de la R5. Mais en 1996, c’est la révolution. Le Kangoo est né, avec un chamboulement majeur : une porte coulissante à l’arrière.
La guerre des portes a bien eu lieu
Ça n’a l’air de rien, une porte posée sur des rails, mais en 1996, pour les artisans, comme pour les familles, c’est le petit plus qui change tout. D’autant que l’ennemi de toujours, PSA, prépare lui aussi une camionnette mixte pour le travail comme pour la famille. Mais Jacques Calvet est alors aux commandes de l’entreprise. N’étant pas vraiment le boss le plus dispendieux de la planète auto, il refuse à ses ingénieurs l’adjonction d’une porte latérale. Les Partner et Berlingo borgnes débarquent sur le marché quelques mois après le Kangoo et c’est un bide compréhensible. Il faudra attendre l’arrivée d’un nouveau PDG (Jean-Martin Folz) pour voir fleurir une porte. Mais pendant ce temps, Renault en a rajouté une seconde. Damned, encore raté.
Peugeot et Citroën ont bien fini par rattraper leur retard en matière d’ouvrants, mais depuis ce temps, Renault et son Kangoo ont toujours gardé une longueur d’avance dans les ventes. Des ventes qui se sont évidemment tassées, les camionnettes étant malmenées d’abord par les monospaces, puis par les SUV. Mais les voilà de retour cette année avec un festival de nouveautés. Car il s’en vend tout de même près de 200 000 par an dans leur livrée « civile » à travers l’Europe. Et ces versions ne représentent que 30 à 40 % de l’ensemble selon les modèles. Le restant étant toujours constitué d’utilitaires à tout faire.
Une alternative au monospace disparu
Pourquoi cette convergence dans le renouvellement de ces engins ? C’est que les ludospaces ont une durée de vie plus élevée qu’une auto classique. Et les millésimes des principaux concurrents sont similaires, et tout aussi anciens. Ainsi, en 22 ans, le Kango n’aura connu que deux générations. L’actuelle, changée en fin d’année, est âgée de dix ans. La longévité des concurrents PSA étant à peu près aussi longue, il était temps d’en changer. En comptant bien, une fois de plus, en vendre aux particuliers. Car toutes ces marques sont persuadées qu’une clientèle existe pour ce type d’engin, même pour un prix moyen qui tourne autour de 25 000 euros.
Chez Peugeot, le calcul est simple : la marque n’a plus de monospace dans sa gamme depuis la transformation du 5008 en SUV. Il en va de même pour Opel dont le Zafira va disparaître. Proposer une alternative à ceux qui trouvent un break 308 (ou Opel Astra) trop exigu et un 3008 (ou Opel Grandland) trop cher, est logique.
Un développement low cost
Chez Citroën et Renault, la volonté de disposer d’un ludospace au catalogue est moins évidente, mais pas financièrement moins rentable. Développer une auto standard coûte ultra-cher. À part la plateforme généralement utilisée pour plusieurs modèles, de nombreuses pièces sont spécifiques. Pas pour un ludospace. L’utilitaire original est entièrement conservé, des soubassements jusqu’à la coque, en passant par la planche de bord. Et ce ne sont pas les garnissages insonorisants, la banquette arrière et les équipements supplémentaires qui vont grever le coût du développement et de fabrication de l’engin.
Alors, si le futur Kangoo, le Rifter ou le Berlingo n’explose pas ses objectifs, le bilan comptable de l’entreprise n’en sera pas bouleversé. En revanche, si le succès est à la clé, il pourrait bien en profiter. Le ludospace ? Une petite mise pour un pari peut-être gagnant.
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