Quelques semaines avant la publication des résultats décevants du groupe PSA pour l'année 2009 (triplement des pertes par rapport à 2008, 11% de baisse du CA), Citroën avait convié quelques journalistes au C42 sur les Champs Élysée pour présenter en avant-première la campagne de communication qui accompagnera le lancement de la DS3 en mars prochain, invité d'honneur : Jacques Séguéla, vice-président d'Havas-Advertising.
L'agence H (groupe Havas), qui a réalisé cette campagne que Caradisiac vous a déjà présenté, a choisi de promouvoir le premier modèle de cette ligne distinctive comme un véhicule « Anti-rétro ». Le concept : ce n'est pas parce que la marque aux chevrons fait revivre cette légende des Trente Glorieuses, qu'elle a pour autant abandonné son positionnement « Creative Technologie ». Au contraire, si Citroën s'appuie sur cet élément fort de son patrimoine historique, ce n'est que pour mieux asseoir ses performances et son audace dans le domaine de l'innovation. En effet, selon Marc Lloyd, responsable du style de la DS3, cette gamme « de complément » a pour vocation « d'alimenter la ligne de série, un peu comme les concept-cars ».
Dans cette perspective, les deux spots de trente secondes conçus par l'agence sont vraiment réussis. Celle-ci a en effet utilisé les images d'archives de deux légendes disparues : Marylin Monroe et John Lennon qui s'expriment à peu près en ces termes : « Arrêtez de regarder vers le passé, et profitez du présent pour mieux construire l'avenir » en gros, « arrêtez de regarder dans le rétro, et foncez droit devant ». Les extraits sont très bien choisis, le message percutant, et la référence à ces personnages aussi talentueux que sulfureux semble coller parfaitement au brief que la marque, à travers Jean-Marc Savigné, son responsable de la publicité, a soumis à son agence : « Faire revivre un nom mythique, en le réincarnant dans un produit moderne ».
Campagne DS3 : Citroën casse des rétros pour vendre du néo-rétro !
Campagne DS3 : Citroën casse des rétros pour vendre du néo-rétro !
Pourtant, il m'a tout de suite semblé que quelque chose sonnait faux dans cette campagne, et m'est avis que cela est très certainement dû à la stratégie marketing mise en place dès le départ par Citroën. Pour vous convaincre, je vous propose de visionner cette vidéo destinée à la plateforme web de la DS3 (il y en a toute une série, mais elles ne sont pas disponibles en ligne pour le moment), et ces visuels destinés à la campagne print.
Ça ne vous paraît pas étrange de communiquer autour d'un modèle dont la dénomination fait clairement référence à la tendance néo-rétro, en criant haut et fort : « La DS3, c'est tout sauf du rétro ! » ? Pourquoi dans ce cas avoir donné l'appellation DS à cette nouvelle gamme, si c'est pour ensuite l'écraser avec fracas, dans des spots qui disent « Non !» à la nostalgie ? D'autant plus qu'elle ne ressemble pas franchement à son ancêtre.
C'est un peu comme si la marque refusait au dernier moment d'assumer son parti pris. Peut-être a t-elle pris conscience du ras-le-bol d'une partie du public, lassé par les références au passé, par le manque de créativité dont font preuve les constructeurs. Nous l'avions vu dans ce précédent dossier, les exemples ne manquent pas de marques qui remettent au goût du jour leurs vieux succès. Citroën a donc demandé à son agence de parvenir à concilier la dimension néo-rétro de son projet, avec les exigences d'innovation et de créativité réclamées par le public. L'agence H a donc du se dépêtrer avec cette question « Comment un mythe peut-il parler du futur ? » (Christophe Lafarge, président d'H)
Si cet exercice périlleux semble avoir été relevé dans la forme, il n'en demeure pas moins qu'un certain malaise persiste, qui place la cible dans une sorte de double-contrainte (« double-bind » pour les puristes), entre ancrage historique, et rejet violent du passéisme. Pour ma part, j'ai donc l'impression d'assister, impuissant, à une marque qui se tire une balle dans le pied. Et ce, malgré les efforts de Jacques Séguéla, invité spécial de l'évènement, pour nous expliquer que « Quand la neige fond, elle devient le printemps », et que cette opération est finalement « la campagne d'un éternel printemps ». Cela dit, les ventes de ce modèle aux courbes plutôt séduisantes, permettront peut-être de passer outre ce qu'il me semble être une erreur marketing. Car comme le dit avec justesse ce cher M. Séguéla: « Ce sont les produits qui font le succès d'une campagne, et non l'inverse ».
Source vidéo : http://blogopub.tv
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