Faut-il avoir peur de Xiaomi, le nouvel ogre chinois ?
Le Chinois a le vent en poupe. Mais derrière sa réussite effrontée, du moins sur le papier, et avant son arrivée programmée en Europe, quelle est la véritable stratégie du nouveau constructeur chinois et quelles sont ses chances de réussite ?

C’est l’une de ces success story dont le public raffole et dont les concurrents se méfient. Moins de quatre ans après ses débuts dans l’automobile, le Chinois Xiaomi, qu’il convient de prononcer Chiaomi, affirme être en passe d’être rentable, et de produire 350 000 autos électriques par an.
Du jamais vu, dans un monde ou Tesla, la dernière vraie réussite de la filière, pourtant jugé rapide dans sa montée en cadence, a mis plus d’une décennie pour produire autant de voitures, et près de quinze ans pour gagner de l’argent.
Les constructeurs traditionnels sceptiques
Alors, les dirigeants du canal historique de l’automobile ont souri lorsque le boss de Xiaomi, Lei Jun, a annoncé, en 2021, qu'il allait fabriquer une voiture. « Un de plus qui va se casser les dents sur les réalités d’une industrie plutôt lourde « se disaient-ils alors.
Sauf que le patron et son entreprise ont fait plus que tenir leurs promesses, sur le papier du moins : fin 2023, ils présentent la berline SU7 à Pékin. Et c’est un carton, du moins selon une légende maison savamment entretenue. En l’espace de 14 mois, près de 300 000 commandes auraient été enregistrées.

Et au début de cette année, Xiaomi a fait plus fort encore avec son nouveau modèle : le YU7. En l’espace de 3 minutes seulement, il aurait engrangé 200 000 commandes.
Lei Jun quant à lui se sent pousser des ailes, affirmant, à qui lui tend un micro, que non seulement il est en passe d’être rentable, mais que d’ici 15 à 20 ans, il sera dans le top 5 des plus gros constructeurs mondiaux et qu’il compte bien débarquer en Europe d’ici deux ans.
Du coup, les barons historiques ne rient plus du tout, et se penchent sérieusement sur le cas pékinois. Pour les fins limiers allemands de la Deutsche Bank, les chiffres ne seraient pas aussi florissants qu’annoncés et, de plus, selon le très officiel « China Automobile Quality Network », les Xiaomi souffriraient d’un déficit de qualité, sans compter quelques entourloupes faites à des clients floués par des options qui ne tiennent pas leurs promesses.
Xiaomi ne serait-il qu’un feu de paille ? ce serait aller un peu vite en besogne, surtout si l’on observe le passé de cette boîte. Car Lei Jun est en train de reproduire à l’identique une stratégie qui lui a déjà parfaitement réussi.

C’est qu’avant l’automobile, Xiaomi était spécialisée dans la téléphonie. Crée pour concevoir une simple appli, l’entreprise a rapidement développé un système complet, avant de fabriquer les téléphones entiers. Pour y parvenir, elle a rapidement débauché, et à grands frais, des cadors de la tech, notamment chez Google.
Ensuite, la start-up devenue une licorne puis une grande entreprise a patiemment conquis son marché local, la Chine, avant de s’embarquer pour Hong Kong, Taïwan puis le monde entier.
En décidant de se lancer dans l’automobile, Lei Jun applique exactement la même tactique. Il s’entoure de compétences extérieures, notamment des transfuges de chez BMW, creuse son trou en Chine, puis décide d’attaquer l’Europe et, peut-être par la suite, le reste du monde.
Une stratégie gagnante ? Pas si sûr, car les exportations automobiles ne sont pas du même calibre que celles qui sont liées à la téléphonie, surtout par les temps qui courent.
Lei Jun bluffe-t-il ?
Si en Europe, les importations d’autos de l’Empire du milieu pourraient bien s’adoucir, et des négociations entre Bruxelles et Pékin sont en cours dans ce sens, le visa pour les US leur est presque interdit, à moins de s’acquitter d’une taxe douanière de 125 %.
Xiaomi dispose-t-il de suffisamment de cash pour bâtir des usines eux États-Unis et en Europe afin de contrer les barrières douanières, même si ces dernières sont pour le moins fluctuantes ? Difficile à savoir tant les comptes des entreprises de là-bas sont opaques. Mais en tout cas, dans les cinq ans à venir, l’on devrait savoir si l’Elon Musk de Pékin bluffe, ou pas.
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