Faut-il encore acheter un diesel en occasion ?
C'est LA question du moment ! Le véhicule diesel est depuis quelque temps vilipendé, accusé de tous les maux, banni des centres-villes. Et les acheteurs se ruent sur les modèles essence. Alors, acheter un diesel d'occasion peut-il encore représenter un choix raisonnable, ou faut-il en avoir peur ? Caradisiac a creusé la question...
On n'avait pas assisté à un tel retournement de situation depuis... l'essor du diesel dans les années 90 et 2000 ! Le moteur diesel, coqueluche des acheteurs pendant près de 20 ans, est en train au contraire de devenir celui qu'il faut à tout prix éviter.
Représentant plus de 72 % des ventes de voitures neuves en 2012, il est l'année dernière, en 2018, passé sous les 40 % du marché, et les observateurs les plus pessimistes lui prédisent moins d'un quart des ventes dans 2 ans.
Que s'est-il donc passé ? Tout à commencé avec le dieselgate Volkswagen. Depuis, c'est simple, les scandales de triche et sanitaires ont terni sa réputation. Il est aujourd'hui considéré comme polluant, source de maladies respiratoires, à cause de ses rejets de Nox (oxydes d'azote) élevés.
Côté ventes en neuf, son sort semble donc scellé. Mais en occasion, un achat peut rester intéressant. Car avec son image de marque en berne, le diesel devient, semble-t-il, plus abordable en seconde main, lui qui des dizaines d'années durant, a gardé des cotes supérieures aux modèles essence. Du coup, de bonnes affaires sont à faire.
Pollution et prix, il n'y a pas que cela qui peut faire pencher ou pas la balance en sa faveur. Nous avons donc cherché à peser le pour et le contre. Et selon ce qui pèse le plus lourd à votre niveau, vous pourrez ainsi décider si oui ou non, un achat de diesel en occasion est pertinent dans votre cas.
La pollution, un argument pour ou contre ?
Bien sûr, on peut en débattre. Oui, ses rejets de Nox (responsables de maladies respiratoires) sont plus élevés que ceux des moteurs essence. Les diesels respectant les dernières normes Euro6 d Temp, qui ont limité drastiquement les émissions, ne sont pas spécialement les monstres de pollution que l'on décrit, mais les rejets restent plus importants. Les systèmes de dépollution coûteux (pièges à Nox, filtres SCR c'est-à-dire la réduction catalytique sélective) sont efficaces, mais il persiste un doute sur les émissions réelles en circulation. Doute levé avec les nouveaux cycles d'homologation qui comprennent un cycle "RDE" c'est à dire en conditions réelles. Mais les diesels d'occasion, eux, rejettent sans doute des Nox à qui mieux mieux...
Par contre le diesel reste, de par sa sobriété toujours reconnue, le champion des basses émissions de CO2 (qui rappelons-le, n'est pas un polluant, mais un gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique, mais dont on parle comme d'un polluant). Ses émissions de particules, obligatoirement filtrées depuis 2011, ne sont pas supérieures aux derniers moteurs essence à injection directe, qui se voient également obligés d'opter pour le filtre pour respecter les dernières normes, et qui arrivent aussi aujourd'hui sur le marché de l'occasion...
Du coup, comment donner l'avantage à l'un ou à l'autre ? Aucun des deux n'est au final capable de rejeter un air pur. Mais il semble que le diesel, même si les choses sont toujours plus compliquées qu'elles n'y paraissent, soit plus "polluant" au sens strict du terme, et plus nocif pour les voix respiratoires, que l'essence.
Verdict : un argument CONTRE
Le prix, un argument pour ou contre ?
On a répété pendant 20 ans que les diesels gardaient une cote d'enfer et qu'ils perdaient moins de valeur que leurs homologues essence. Cela justifiait d'ailleurs en partie leur surcoût. On se disait qu'on en récupérerait une grande partie à la revente. Et pour les acheteurs en occasion, il était difficile de faire de bonnes affaires.
Mais cette époque-là est révolue. Depuis quelque temps déjà, les prix des diesels d'occasion chutent, face à une pénurie d'acheteurs, qui se tournent vers les modèles essence. Les modèles s'éternisent dans les colonnes de petites annonces. La concurrence est rude entre vendeurs, qui se retrouvent plus nombreux face à moins d'acquéreurs potentiels.
Il faut brader. Du coup, pour les acheteurs de diesel, c'est tout bénéfice. Les diesels anciens, potentiellement touchés par des restrictions de circulation, deviennent très accessibles, tandis que même les plus récents sont touchés de plein fouet par l'aspect psychologique des choses. On répète au public que le diesel, c'est le mal, et qu'il risque d'être banni des centres-villes. Il est donc boudé.
Nous avons tenté de voir dans quelles proportions ce phénomène est bien réel. Nous avons calculé, pour 10 modèles, toutes marques confondues, la décote pour certaines années (4 ans, 2 ans ou 1 an pour les plus récentes), en se basant sur des modèles comparables essence et diesel.
Et les résultats sont impressionnants. La décote est systématiquement plus brutale pour le modèle diesel, et parfois dans des proportions énormes. Par exemple, une Renault Clio 4 1.5 dCi 90 de 4 ans décote en moyenne de 50 %. C'est 43 % seulement pour le modèle 0.9 TCe 90. Plus impressionnant encore, la toute dernière Citroën C3 décote en 1 an de 33 % pour un 1.6 BlueHDI 75, et seulement 23 % pour un essence 1.2 Puretech 82. Pire encore pour une Volkswagen Golf de 2 ans. C'est - 44 % pour le diesel, et - 32 % pour l'essence seulement. De notre panel, seules la Peugeot 208 et la Ford Fiesta d'ancienne génération ont montré une décote comparable entre les deux types de motorisation.
Au final, vous l'aurez compris, il y a aujourd'hui d'excellentes affaires à réaliser sur les modèles diesel.
Verdict : un argument POUR
La consommation, un argument pour ou contre ?
Les blocs essence modernes ont fait beaucoup de progrès. Du moins au niveau des consommations officielles. Cependant, à puissance équivalente, les moteurs diesels restent les champions de la consommation. Selon les moteurs et les gammes, la différence se situe entre 1 litre et 1,8 litres en faveur du gazole. Et dans la vraie vie, les différences se creusent encore. Si l'écart est de 1 litre officiellement, il n'est pas rare qu'en réalité il monte à 2. Et plus encore si vous effectuez beaucoup de trajet en ville, où les essence surconsomment bien plus que les mazouts !
Si l'on prend en compte le prix moyen des carburants aujourd'hui, un kilométrage moyen de 15 000 km, et une consommation en essence supérieure de 1,5 litre par rapport au diesel (5 litres contre 6,5 litres), cela donne une économie de carburant de 332 euros par an avec le moteur diesel.
Bien sûr, plus on parcourt de kilomètres, plus le gain en faveur du gazole est important, et inversement.
Attention, malgré l'abandon de la mesure pour 2019, il se peut que le gouvernement remette en route le rééquilibrage des taxes sur les carburants. Le prix du gazole pourrait alors passer bien au-dessus de celui de l'essence. La moindre consommation donne encore de la marge au diesel, mais elle pourrait se réduire à peau de chagrin. Les calculs seraient, et sont de toute façon à refaire au moment de l'achat.
Verdict : un argument POUR (en tout cas pour le moment...)
Les tarifs d'assurance, un argument pour ou contre ?
Les assureurs, pour déterminer les primes d'assurances, se basent avant tout sur le "risque" de leur client. Lieu d'habitation, mode de parking, âge, sinistralité passée, puissance. Mais ils se basent aussi sur la valeur du véhicule, qui détermine le remboursement en cas de vol par exemple...
Ainsi, les voitures diesel devraient être théoriquement plus chères à assurer, car à puissance et finition équivalente, les modèles diesels sont plus chers en neuf.
Sur le terrain, la réalité est plus contrastée. Nous avons établi des devis pour une dizaine de modèles parmi les meilleures ventes du marché. Pour un profil d'assuré bien sûr identique, et en choisissant des versions équivalentes. Concrètement, des différences de tarif existent bel et bien, en faveur de l'essence. Mais elles tiennent de l'anecdotique. Les écarts tiennent dans un mouchoir de poche : entre 6 et 10 euros par an. soit environ 1 % d'écart. Et c'est une moyenne, car par exemple, le Peugeot 3008 1.5 BlueHDI 130 est 6 € moins cher que son homologue essence 1.2 Puretech 130.
Verdict : ni POUR ni CONTRE
Les coûts d'entretien, un argument pour ou contre ?
Dans l'inconscient collectif, un véhicule diesel est plus cher à entretenir qu'un essence. Mais en réalité, c'est beaucoup plus nuancé. Depuis quelques années, les moteurs essence ont gagné en technicité, et leur entretien se révèle au final aussi onéreux.
Les différentes études publiées depuis quelques années sont toutes d'accord. En moyenne, les coûts annuels sont peu ou prou équivalents. Un tout petit peu moins cher en essence, mais de l'ordre, comme pour l'assurance, de la dizaine d'euros.
Sorti de la moyenne, il faut en réalité regarder modèle par modèle. Ce sera donc à vous, en envisageant un achat, de vous renseigner auprès des concessions (ou des forums) pour déterminer ce qu'il en est pour un modèle précis.
Verdict : ni POUR ni CONTRE
Le prix des pièces, un argument pour ou contre ?
Ici, un consensus se dégage assez vite. Les pièces détachées pour les diesels sont plus chères que pour les essences. Les premiers sont en moyenne plus lourds, plus coupleux que les seconds. Leurs pressions d'injection n'ont rien à voir (très haute pression pour les diesels). La conséquence, c'est qu'en moyenne les systèmes de freinage sont majorés, les embrayages plus costauds, les injecteurs ou rampes communes d'injection bien plus sophistiqués. Et donc plus chers. On revient par contre petit à petit à égalité concernant les turbos, la plupart des blocs essence depuis quelques années maintenant en étant aussi dotés. Les diesels sont aussi dépollués depuis longtemps, et l'entretien ou le remplacement des vannes EGR (recyclage des gaz d'échappement) et FAP (filtres à particules) sont particulièrement coûteux. Cela arrive sur les tout derniers moteurs essence, mais en occasion, on n'en parle pas encore...
Au final, le prix du panier de pièces est sensiblement plus élevé en diesel, de l'ordre, suivant les modèles, de 20 à 40 %. Ce n'est absolument pas négligeable. Car si les coûts en entretien courant sont, nous l'avons vu, proches, la moindre réparation ou remplacement de grosse pièce d'usure sera plus douloureux en diesel.
Verdict : un argument CONTRE
Les restrictions de circulation, un argument pour ou contre ?
Ici le diesel est clairement défavorisé. Mais pas mort pour autant ! Il existe aujourd'hui en France 6 zones de circulation restreinte (ZCR), dans lesquelles les restrictions sont permanentes et l'apposition d'une vignette Crit'air obligatoire. Il s'agit de Paris, Lyon (y compris Villeurbanne), Lille et sa métropole, Grenoble et sa métropole, Strasbourg et sa métropole. Il existe aussi des zones de protection de l'air (ZPA) dans lesquelles les restrictions de circulation sont activées en cas de pic de pollution uniquement. Et certaines ZCR activent des conditions plus sévères lors de ces pics.
Les véhicules sont de leur côté classés en 6 catégories (en fait 7 avec celle qui ne peuvent obtenir de vignette. Les véhicules essence ou diesel d'avant le 1er janvier 1997 sont dans ce cas.
Les diesels respectant la norme Euro 2 (entre le 1er janvier 97 et le 31 décembre 2000) ont une vignette Crit'air 5.
Les diesels respectant la norme Euro 3 (entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2005) ont une vignette Crit'air 4.
Les essence respectant Euro 2 et 3 (entre le 1er janvier 97 et le 31 décembre 2005) et les diesels respectant Euro 4 (entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2010) ont une vignette Crit'air 3.
Les essence Euro 4 (entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2010) et les diesels Euro 5 et 6 (à partir du 1er janvier 2011) ont une vignette Crit'air 2.
Les essence Euro 5 et 6 (à partir du 1er janvier 2011) ont une vignette Crit'air 1, tout comme les véhicules GNV et hybrides rechargeables.
Enfin les voitures électriques ont une vignette verte sans numéro.
On le voit rapidement, les diesels sont donc assez largement défavorisés par ces vignettes. Ceux respectant les mêmes normes de pollution que les essence récupérant une vignette moins intéressante.
À Paris, en juillet 2019, les vignettes Crit'air 4 deviendront interdites en semaine de 8h à 20h. Cela met de côté tous les diesels de plus de 13 ans. Et ceux sans vignette ou en Crit'air 5 seront interdits dans l'enceinte du grand Paris (c'est-à-dire à l'intérieur de l'A86).
Cela dit, tout le monde n'habite pas Paris ou les grandes villes. C'est un fait. Et pour ceux qui circulent majoritairement en province et/ou ne circulent dans les grandes villes que le week-end, ce système de ZCR n'a que peu d'importance dans les faits. Il n'en est pas de même cependant dans les esprits. Et la perspective de la multiplication de ces ZCR et d'une sévérité accrue des restrictions de circulation, touchant plus les diesels que les essence, donne un désavantage certains aux premiers par rapport aux seconds.
Verdict : un argument CONTRE
La revente, un argument pour ou contre ?
Pour les mêmes raisons que la perspective d'une sévérisation des restrictions de circulation pour les diesels donne peu envie d'en acheter, en revendre un va s'avérer de plus en plus compliqué.
Le marché du neuf est aujourd'hui clairement orienté essence. La part de marché du diesel, au plus haut en 2012/2013, est repassée sous les 50 % depuis 2 ans (47 % en 2017, moins de 40 % en 2018). Et c'est une évidence, le marché de l'occasion va lui aussi suivre cette tendance.
Du coup, sur un marché ou 70 % de l'offre est diesel, mais avec une demande globalement à 40 %, ça va coincer. Les décotes actuelles le prouvent : pour vendre un diesel aujourd'hui, il faut le brader. C'est particulièrement vrai en Ile-de-France. Du coup, les vendeurs perdent de l'argent, et les délais pour vendre un diesel s'allongent.
Du coup c'est un paradoxe qui ressemble à une évidence. On aura acheté son diesel peu cher, en faisant une bonne affaire. Mais à l'autre bout de la période de propriété, c'est un inconvénient de se retrouver vendeur d'un diesel. Et cela le sera de plus en plus, sauf retournement de tendance surprise.
Verdict : un argument CONTRE
La fiabilité, un argument pour ou contre ?
Comme pour la décote, qui a longtemps été en faveur du diesel, on a tendance à penser que le diesel est plus fiable que l'essence. Il faut en effet du temps pour contrer les idées reçues. Car en effet, cela fait longtemps que les diesels ne sont plus indestructibles. Depuis la fin des années 90, l'apparition des turbos, des injections directes, des rampes communes, des systèmes de dépollution (vanne EGR, débitmètre, puis filtres à particules) a fait dégringoler la fiabilité. À tel point que les moteurs essence sont devenus bien plus fiables, surtout dans les années 2000 et début 2010.
Aujourd'hui, à nouveau, les choses se rééquilibrent, car les essence ont aussi subi des transformations, des modernisations, ou des choix techniques nouveaux. Les injections directes, turbos, systèmes de dépollution ont aussi fait leur apparition. Et le downsizing (réduction des cylindrées) n'a pas fait que du bien. Sans parler de soucis ponctuels chez certains constructeurs (avec les chaînes de distribution, les boîtes de vitesses, etc).
En tout état de cause, on ne peut plus dire que la fiabilité est en faveur du diesel. Surtout sur le marché de l'occasion, où l'on achète des véhicules qui ont quelques années (et en majorité des plus de 5 ans), le risque de panne est au contraire plus important.
Verdict : un argument CONTRE
LE BILAN
L'argument | POUR OU CONTRE |
Pollution | Contre |
Prix | Pour |
Consommation | Pour |
Tarifs d'assurance | Ni pour ni contre |
Coût d'entretien | Ni pour ni contre |
Prix des pièces | Contre |
Restrictions de circulation | Contre |
Revente | Contre |
Fiabilité | Contre |
De façon purement comptable, le diesel reçoit 4 mentions POUR et 7 mentions CONTRE. Il réunit donc plus d'arguments en sa dévafeur qu'en sa faveur. Mais c'est sans pondérer chacun d'entre eux. Si pour vous la revente et la fiabilité sont très importants, cela ne fera que conforter ce résultat. Si au contraire c'est le prix à l'achat et la consommation qui vous importent le plus, cela fait basculer le diesel du côté des fréquentables pour vous. Si vous êtes (ou allez être) soumis à des restrictions de circulation, la question ne se pose même plus. Mais de façon la plus objective possible, sans donner plus de poids à un argument ou à un autre, le diesel est plutôt à déconseiller en occasion aujourd'hui.
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