La filière auto et l'Union européenne fument enfin le calumet de la paix
L'INFO DU JOUR - Ce jeudi 30 janvier, Bruxelles organise un sommet sur la stratégie à mettre en place pour l'avenir de l'automobile en Europe. Autour de la table, constructeurs et commissaires européens sont enfin réunis pour évoquer une (longue) liste de problèmes.
C'est une autre forme de conclave, une initiative que l'industrie automobile européenne attend depuis des mois. Et tous les constructeurs sont plutôt guillerets à l’idée d'y participer car, pour une fois, ce n'est pas un couperet qui les attend. C’est que la Commission européenne, qui réunit la filière à partir de ce jeudi 30 janvier pour un « dialogue stratégique », est, pour une fois, plutôt à l’écoute, et même plus que ça.
24 heures avant le début de cette série de réunions, Bruxelles a d’emblée voulu rassurer ses invités en se donnant pour objectif de trouver « des solutions immédiates pour préserver la capacité de l'industrie à investir, en examinant les flexibilités possibles afin de garantir que notre industrie reste compétitive ». Et pour montrer que le sujet la préoccupait, la patronne de la Commission, Ursula van der Leyen préside elle-même la rencontre.
Bruxelles adepte de la câlinothérapie
Une présidente qui, après un long silence sur la question, a d’ailleurs décidé de sortir le distributeur à câlins pour calmer la filière, expliquant que « la commission soutient l'industrie automobile dans sa profonde transition. Et veille à ce que l'avenir des voitures reste fermement ancré en Europe. »
Un avenir à court comme à long terme semé d’embûches qui vont donc être examinées unes à unes. Entre les normes Cafe 2025, les aides à la voiture électrique et les constructeurs chinois, les problèmes de l’automobile volent en escadrille et les constructeurs font donc le pèlerinage de Bruxelles avec leur cahier de doléances. Ils semblent d’ailleurs rencontrer une oreille attentive, et pas seulement auprès de la présidente de la Commission.
Le français Stéphane Séjourné semble de leur côté, du moins en ce qui concerne le seuil de 81 g des normes Cafe et les lourdes amendes qui découleraient de leur dépassement. Le commissaire européen, interrogé par Le Figaro, a trouvé « bizarre de pénaliser des acteurs que l'on essaye par ailleurs d'aider ».
Alors, pour ménager la chèvre de Bruxelles qui ne veut pas transiger avec la réduction d’émissions de cette année et le chou de l’industrie soutenue par Séjourné, les amendes pour les marques dépassant le seuil obligatoire ne devraient pas être assouplies, mais lissées sur plusieurs années. Les 16 milliards d’euros ne seront donc pas exigibles au 1er janvier de l’an prochain, mais d'ici trois ou quatre ans selon la volonté de certains pays et plutôt aux calendes grecques selon le souhait des autres.
L’autre dossier abordé au cours du conclave concerne bien entendu les aides à la voiture électrique. Des aides réclamées par les constructeurs pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs clients. De plus en plus de voix, et de pays, dont la France, demandent d'ailleurs un bonus européen, plutôt que national. Une demande entendue par Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission. « Cela fait sens d'examiner comment faciliter des mesures au niveau paneuropéen au lieu de passer par des subventions nationales ». Reste à trouver une ligne budgétaire pour dégager cet eurobonus, ce qui reste une affaire autrement complexe qu’une simple décision politique destinée à combler d’aise une filière.
Enfin, à la table de cette grande rencontre bruxelloise, il sera bien entendu question de la Chine dont l’ombre planera au-dessus de toutes les discussions. L’UE a déjà mis en place des barrières douanières en augmentant les taxes sur les autos de l’Empire du milieu à l’entrée de l’Union. Mais les constructeurs chinois tentent de contourner les taxes en question en fabriquant leurs modèles directement en Europe. L’UE n’est évidemment pas dupe de la manœuvre, mais elle cherche la faille juridique pour les en empêcher.
La fin du green deal ?
La réunion pourrait donc se transformer en séance de brainstorming avec, autour de la table, Stellantis, Volkswagen, Mercedes, BMW et Renault d’un côté, et les experts et les commissaires bruxellois de l’autre. Les édiles de l’Union qui se sont enfin rendu compte que l’automobile représentait 13 millions de salariés en Europe, et 7 % du PIB de l’Union. Résultat : la volonté d’assouplir les normes sur les émissions de C02 n’est plus un tabou à Bruxelles, même si la Commission comme le Parlement s’en défendent.
Sauf qu'en raison de cette prise de conscience, le green deal européen et son credo de neutralité carbone en 2050 ont du plomb dans l’aile. Si auparavant, seules l’Italie de Giorgia Meloni et la Hongrie de Viktor Orban voulaient sa peau, aujourd’hui, L’Allemagne comme la France commencent à demander l’annulation de plusieurs de ses dispositifs. L’objectif 2035 n’y figure pas. Du moins pas encore.
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