Luxe, calme et six-cylindres : quand Peugeot défie Mercedes
En plein règne des SUV électriques, rouler en berline à 6 cylindres constitue un acte de résistance, surtout quand elles ont des watts. C’est le cas des Mercedes C280 et Peugeot 406 V6, plus de 190 ch chacune, qui, de surcroît, ne coûtent pas bien cher : dès 3 500 €.
Après le fiasco de la 605, Peugeot redresse magnifiquement la barre en matière de qualité, avec d’abord avec la 106, ensuite la 306 puis la plus grande 406. Celle-ci vise plus haut en gamme qu’aucune de ses devancières, au point de se doter du tout nouveau V6 ES.
Voilà qui la place en concurrence directe avec des allemandes réputées, comme la Mercedes Classe C. Inimaginable 5 ans auparavant, quand la 405 paraissait bien frêle face à l'imputrescible 190 ! La Classe C W202 reçoit en C280, variante la plus huppée avant la sportive AMG), un beau 6-en-ligne. Si elle coûtait bien plus cher que la Peugeot dans les années 90, ce n’est plus le cas aujourd’hui, où nos deux rivales s’affichent à des prix comparables. Mais laquelle choisir si on souhaite une familiale offrant un max de plaisir mais à prix plancher ?
Les forces en présence
Mercedes-Benz C280 (1993 - 2000) : berline 4 portes, 6 cylindres en ligne (en V dès 1997), 2,8 l , 193 ch (197 ch dès 1996), 270 Nm (265 Nm dès 1997), 1 490 kg, 230 km/h (232 km/h dès 1997), à partir de 3 500 €.
Peugeot 406 V6 (1996-2003), berline 4 portes, 6 cylindres en V, 2,9 l, 194 ch (210 ch dès 2000), 267 Nm (285 Nm dès 2000), 1 455 kg, 232 km/h (240 km/h dès 2000), à partir de 4 500 €.
Présentation : l’une stagne, l’autre monte en gamme
Audacieuse, tant par son esthétique que son gabarit et sa technologie, la 190 a été un grand succès pour Mercedes. Comment lui succéder ? C’est simple, on va actualiser la recette de son succès, mais sans trop prendre de risques. Le constructeur allemand commence à plus se soucier du prix de revient que de dominer la concurrence… La technologie demeure similaire (propulsion, essieu arrière multibras) mais sur une nouvelle plate-forme favorisant encore plus la sécurité passive. La carrosserie, due à l’équipe de Bruno Sacco, introduit de nouveaux gimmicks esthétiques comme les feux arrière verticaux que l’on retrouvera sur le SLK, mais se contente d'une aérodynamique banale (Cx de 0.32) et d'un look globalement plan-plan.
Néanmoins, cette petite Mercedes inaugure une appellation encore utilisée actuellement : Classe C. Présentée en mai 1993, elle ne dérange pas la clientèle tant elle s’inscrit dans le sillage de la 190. Jusque dans les prix très élevés et l’équipement succinct. Ainsi, la C280, pourtant dotée d’un beau 6-en-ligne M104 E28, un 2,8 l 24 soupapes de 193 ch, facture à peu près tous les équipements intéressants. Par exemple, malgré un prix massue de 214 000 F (52 800 € actuels selon l’Insee) en finition Classic, il faut encore mettre la main à la poche pour obtenir la clim, l’airbag passager, les vitres arrière électriques, le volant réglable voire l’antipatinage…
Facturée 19 200 F supplémentaires, la Sport ajoute une suspension affermie et abaissée, des sièges enveloppants, de grandes jantes en alliage et des parements en alu. On peut se contenter de l’Elegance, tout de même 14 000 F plus chère que la version de base mais guère mieux équipée, tout comme l’Esprit, un poil plus onéreuse que la Classic, dont elle se différencie par sa décoration, sa suspension sport et la banquette arrière rabattable en deux parties… qu'elle perd. Capable de 230 km/h, la C280 s’équipe au choix d’une boîte 5 manuelle ou d’une automatique à 4 vitesses. Celle-ci change dès 1996, gagnant un 5e rapport et une gestion électronique.
En juin 1997, la Classe C bénéficie d’un restylage léger en apparence (nouveaux boucliers, feux arrière fumés) mais techniquement plus profond. La C280 adopte en effet un nouveau moteur, cette fois un V6 M112 E28 à 3 soupapes par cylindre et double allumage développant 197 ch. Par ailleurs, l’équipement s’enrichit… sans excès. Au moins toutes les 280 bénéficient-elles en série de la clim et des airbags latéraux. De plus, elles peuvent désormais se décliner en break SW. En 2000, après avoir été fabriquée à 1,85 million d'unités, la Classe C W202 cède la place à la W203, au dessin bien plus dynamique.
Pour remplacer la 405, qui a connu un immense succès malgré ses soucis initiaux de qualité, Peugeot casse sa tirelire : 5,7 milliards de francs. Sochaux développe une nouvelle plate-forme à partir de celle de la Citroën Xantia, conçoit une suspension très raffinée à essieu arrière multibras, soigne la qualité comme jamais, peaufine au maximum la mise au point et… se passe de Pininfarina, pourtant auteur des lignes presque toutes les berlines Peugeot depuis la 403.
Ce projet, codé D8, débouche en 1995 sur la 406, qui convainc immédiatement par son comportement routier, son confort, sa finition et même sa ligne due à l’équipe de Gérard Welter. En 1996, une première pour une Peugeot de ce niveau de gamme, un V6 équipe la 406, le fameux V6 ES9, un 2 946 cm3 à 24 soupapes développant 194 ch qui remplace le PRV. Contrairement à ce dernier, il adopte une distribution à courroie commandant 4 arbres à cames en tête. Pas mal !
Ce bloc s’associe à deux versions très bien équipées, à commencer par la SV, facturée tout de même 196 000 F (45 800 € actuels selon l’Insee). ABS, airbag, clim auto, rétros et vitres électriques, banquette rabattable, jantes en alliage et sono sont de série. À 219 000 F, la variante SVE ajoute notamment les sièges en cuir à réglages électriques, un amortissement piloté étant alors proposé en option.
En 1996, la 406 V6 devient disponible en break mais aussi en coupé, et c’est ce dernier qui va accaparer les ventes de V6… En 1999, la 406 bénéficie d’un restylage un peu étrange, dû à Pininfarina, mais qui s’accompagne d’une dotation enrichie (et de la disparition de la finition SVE). En 2000, le V6, retravaillé par Porsche, passe à 210 ch grâce à l’adjonction de déphaseurs d’arbres à cames, mais les performances ne changent pas outre mesure, tandis que le régulateur de vitesse arrive en série. Pour 2001, la gamme est remaniée, la V6 se déclinant désormais en ST Pack Confort, bénéficiant de série du chargeur de CD mais se contentant d’une sellerie mi-cuir. Fin 2003, après avoir été produite à 1,6 million d'exemplaires, la 406 est remplacée par la 407 qui séduit étrangement moins…
Fiabilité/entretien : deux cœurs très vaillants
Le 6-en-ligne de la C280 s’avère à peu près indestructible s’il est bien entretenu. Bien vérifier le fonctionnement du visco-coupleur du ventilateur de radiateur, sinon on risque une surchauffe et un claquage du joint de culasse à terme. Les boîtes autos, si elles sont vidangées tous les 60 000 km maxi, sont, elles aussi très endurantes. Le V6 M112 est, lui aussi, très costaud, malgré une consommation d’huile parfois élevée à cause de guides de soupapes faiblards.
On peut subir quelques pépins périphériques logiques à fort kilométrage, mais le gros défaut sera le faisceau électrique autour du moteur, un problème courant sur les Mercedes de l’époque. L’habitacle vieillit également très bien, malgré quelques pétouilles électriques et un ciel de toit qui peut s’avachir. Attention, les modèles restylés semblent un peu moins insensibles à la corrosion, un point à surveiller de près si l’exemplaire convoité vient d’Allemagne.
Même s’il a coûté peu cher en développement, le V6 de la 406 se révèle également très solide, enchainant les centaines de milliers de kilomètres sans ennui majeur. Cela passe par une maintenance rigoureuse, dont un changement de courroie de distribution régulier, ce qui vaut un petit billet…
On note quelques soucis de bobines, sans gravité, mais la boîte auto ZF 4HP20 est capricieuse : vidanges impératives tous les 60 000 km maxi, même si Peugeot annonce l’inverse. Pour sa part, l’habitacle vieillit très correctement, mais moins que celui de la Mercedes et les pépins électriques sont plus fréquents, sans que cela ne tourne au drame. La corrosion commence également à faire quelques dégâts.
Avantage : Egalité. Mieux fabriquée et finie que la 406, la C280 ne prend toutefois pas le dessus, à cause de ses soucis de faisceau, parfois coûteux à résoudre.
Vie à bord : générosité française
Dans la C280, on retrouve une ambiance Mercedes à l’ancienne, avec ses avantages et ses inconvénients. D’un côté, les matériaux semblent taillés dans le roc, les assemblages faits pour résister à une guerre nucléaire et l’ergonomie pour ne dérouter personne. On apprécie aussi la présentation sobre et de bon goût. De l’autre, les sièges sont fermes, le volant très grand (et attention, son réglage était optionnel) et l’équipement d’une pingrerie étonnante. On ne sera pas non plus impressionné par l’habitabilité arrière.
Côté finition et présentation, la Peugeot fait très bonne figure même si certains accessoires, comme les commodos, semblent moins robustes que ceux de la Mercedes. Elle se rattrape par sa sellerie nettement plus confortable, son équipement autrement fourni et sa meilleure habitabilité. En revanche, en berline, son coffre n'est pas plus spacieux : 430 l dans nos deux rivales.
Avantage : Peugeot. Moins bien finie que la C280, la 406 se rattrape par son habitabilité, son équipement et sa sellerie plus agréable.
Sur la route : la Peugeot demeure une référence
On a un peu le volant sur les genoux dans la Mercedes, mais son moteur émet un joli son dès le démarrage. Dès lors, on évolue dans une ambiance feutrée, tout étant fort bien insonorisé. La boîte, lente et caoutchouteuse, ne procure cela dit guère d’agrément, au contraire du 6-en-ligne, doux et onctueux. Passé 4 000 tr/min, il connait un regain de punch et propulse plus que dignement cette familiale petite mais raffinée.
Le châssis ? Très Mercedes. Il ne connecte pas vraiment le conducteur à la route, puis, plus on le sollicite plus on constate à quel point il est équilibré et rigoureux. Une sportive plutôt bonne freineuse malgré une pédale molle se cache sous cette ouate ! Seulement, elle préfère mettre l’accent sur le confort, offrant une bonne filtration des inégalités et surtout une excellente insonorisation.
Dans la 406 aussi le volant est un peu trop grand, mais avec tous les réglages de série, on se trouve une meilleure position que dans la Mercedes. Le moteur ? Lui aussi se signale par son caractère très feutré, et surtout une souplesse apparemment supérieure donc remarquable. Il prend aussi très volontiers ses tours, sans agressivité mais avec une énergie réjouissante. La boîte, plaisante à manier et bien étagée, le complète joliment.
Côté châssis, la 406 se veut plus précise que la Mercedes, plus agile aussi, tout en prodiguant une sécurité générale supérieure. Le tout avec un confort de suspension encore meilleur. Sacré travail ! Toutefois, la Peugeot se révèle un peu moins bien isolée des bruits d’air sur autoroute. Quant au freinage, il vaut celui de la Mercedes, avec une pédale plus précise.
Avantage : Peugeot. Si les performances se valent, la Peugeot prend l’avantage grâce à son confort et son comportement routier supérieurs.
Budget : inversion des valeurs
La C280 se dégotte dès 3 500 € en très bon état, en affichant certes plus de 250 000 km. Pas un souci si l’entretien a été suivi. A 5 000 €, on peut espérer une belle auto de 150 000 km. Ensuite, plus le kilométrage baissera plus le prix grimpera de façon exponentielle.
Etonnamment, la 406 V6 est plus chère : 1 000 € de plus que la Mercedes au bas mot, en boîte manuelle. Les automatiques, réputées plus fragiles, s’échangent à des prix similaires à ceux de l'allemande. Autre surprise, la Peugeot consomme un poil moins, à 10,1 /100 km contre
10,4 l /100 km à la C280.
Avantage : Mercedes. Moins chère et à peine plus gourmande que la 406, la C280 prend contre toute attente un léger avantage ici.
Verdict : la Peugeot, eh oui !
Peugeot a réalisé de gros efforts dans les années 90, qui lui ont permis de réduire nettement son écart qualitatif avec Mercedes tout en surpassant la marque à l’étoile en matière de comportement routier. La 406 V6 est l’exemple typique de ce fait, face à une C280 qui avait certes insuffisamment progressé face à sa devancière 190 2.6. Conséquence, la Mercedes est aujourd’hui moins chère : le monde à l’envers ! Dommage que le sochalien n’ait pas su perpétuer sa fiabilité alors retrouvée… En attendant, la 406 V6 remporte le match.
Thème | Avantage |
Fiabilité/entretien | Egalité |
Vie à bord | Peugeot |
Sur la route | Peugeot |
Budget | Mercedes |
Verdict | Peugeot |
> Pour trouver des annonces, rendez-vous sur le site de La Centrale : Mercedes C280, Peugeot 406 V6
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