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Quand Citroën préfigurait le programme Ferrari XX avec sa M35

Sorte de coupé AMI8 doté d’un moteur Wankel, la Citroën M35 n’a été vendue qu’à des clients-testeurs triés sur volet. Ils devaient aider à la mise au point d’une nouvelle technologie tout en faisant de la pub à la marque, comme ceux du programme Ferrari XX, mais sur route ouverte…

Quand Citroën préfigurait le programme Ferrari XX avec sa M35

Dans les années 60, le bureau d’études de Citroën est en ébullition. Ça part même un peu dans les tous les sens, entre le projet F  jamais terminé, la G-Mini tout juste ébauchée, des blocs pour la DS qui ne verront jamais le jour et le moteur rotatif. Inventé par l’ingénieur Felix Wankel, nazi au moins aussi fervent que le Dr Mengele de sinistre mémoire, il intéresse de nombreux constructeurs qui le testent.

Chez Fiat, Dante Giacosa, l’ingénieur en chef, comprend vite que c’est une impasse, mais tout le monde n’est pas aussi clairvoyant. NSU est le premier à le proposer en série, mais vite confronté à des soucis de fiabilité colossaux, s’associe à Citroën pour partager le développement. Ils créent une société commune, la Comotor, et la première application commercialisée du double chevron sera la M35, en 1969.

Quitte à vendre des protos pour des raisons de promotion, autant que cela se voie : la Citroën M35 est bien plus originale que l'Ami8 dont elle dérive.
Quitte à vendre des protos pour des raisons de promotion, autant que cela se voie : la Citroën M35 est bien plus originale que l'Ami8 dont elle dérive.

Dans un éclair de génie, chez Citroën, où les finances sont déjà difficiles, on décide de totalement changer son fusil d’épaule. Au lieu de lieu de développer ses autos dans le secret le plus paranoïaque, le double chevron décide de communiquer à fond sur le moteur rotatif et a l’idée d’en faire payer une partie du développement aux clients.

En clair, on sélectionne des fidèles de la marque, on s’assure qu’ils vont au moins parcourir 30 000 km par an pendant deux ans et on leur vend la voiture à partir de janvier 1970 en leur offrant une garantie royale pour l’époque : toutes les pannes mécaniques seront totalement prises en charge pendant ces deux années (un an pour le reste de l’auto) et un véhicule de remplacement leur sera fourni gracieusement.

Même la sellerie de la Citroën M35 est spécifique. Le tableau dispose d'un compte-tours qui bipe quand on atteint les 7 000 tr/min. Photo : Osenat.
Même la sellerie de la Citroën M35 est spécifique. Le tableau dispose d'un compte-tours qui bipe quand on atteint les 7 000 tr/min. Photo : Osenat.


En des temps où les voitures neuves n’étaient garanties en général que six mois, c’était
intéressant ! Toutefois, les clients-testeurs devront débourser environ 13 500 F (soit 17 000 € actuels selon l’Insee, sachant que la toute nouvelle GS s’en tient à 11 380 F), et  payer l’entretien.

Quand Citroën préfigurait le programme Ferrari XX avec sa M35

Et cette Citroën expérimentale, quelle est-elle ? En gros, c’est un coupé sur base AMI8 mais doté d’un moteur rotatif de 995 cm3 développant 49 ch à la place du bicylindre de 602 cm3 équipant la berline. Dénommée M35, cette deux-portes à la poupe très fuyante, dispose en sus de la suspension hydropneumatique maison.

500 exemplaires sont prévus, qui seront assemblés chez Heuliez. A la conduite, la M35 séduit sur bien des points. Outre un confort royal, elle tient très bien la route, émet peu de bruit et prodigue des performances bien meilleures que celles d’une AMI8 standard, pointant à près de 145 km/h. Aussi rapide qu'une Renault 12, de catégorie supérieure. Les clients sont, en outre, ravis de faire partie d’une élite, sélectionnée par Citroën.

Sont-ce des bidons d'huile destinés à la Citroën M35 que l'on aperçoit sur la pompe à essence ?
Sont-ce des bidons d'huile destinés à la Citroën M35 que l'on aperçoit sur la pompe à essence ?

Mais ils déchanteront vite. Déjà, la M35 révèle un solide appétit en essence, consommant allègrement 10 l/100 km. De plus, le moteur aime à assaisonner son carburant de beaucoup d’huile, avant de casser prématurément. Citroën stoppe l’expérience alors que 267 M35 seulement ont été livrées et cherche à les passer au pilon.

Quand Citroën préfigurait le programme Ferrari XX avec sa M35

On pourrait croire l’expérience  Wankel terminée pour le constructeur. Que nenni ! Il remet ça en 1974 avec la fameuse GS Birotor, et, même causes, mêmes effets. La voiture se révèle séduisante à conduire, mais aussi chère, gourmande et pas fiable. Et là encore, Citroën cherchera à détruire les exemplaires fabriqués. Ce que  Ferrari a eu la délicatesse de ne pas tenter avec les FXX et 599XX, qui n’étaient toutefois pas autorisées à rouler sur la voie publique… Quant au moteur Wankel, seul  Mazda s'entête à l'utiliser en automobile avec des résultats toujours peu probants.

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