A quand des voitures électriques accessibles?
En privilégiant les modèles haut de gamme générant de plus confortables marges, les constructeurs avancent trop lentement sur le dossier de la voiture électrique populaire. Un vrai danger.
La cause de la voiture électrique accessible avance-t-elle aussi rapidement qu’il le faudrait ? Alors que les prix de l’essence battent des records et que les pouvoirs publics menacent d’interdire l’accès aux centres-villes des modèles plus anciens, on aimerait que les constructeurs nous fassent miroiter davantage de modèles « propres » à vocation populaire.
Le cas de la Dacia Spring, modèle électrique affiché aux alentours de 13 000 € bonus déduit et pour lequel les délais de livraisons avoisinent les six mois, devrait pourtant inspirer la concurrence.
Idem pour la Citroën Ami, modèle sans permis qui avait séduit plus de 9 000 clients en Europe au terme de sa première année de commercialisation, et qui sera bientôt disponible chez Opel, où il s’appellera Rocks-e, et peut-être même Fiat.
Certes, ces modèles ne permettent pas aux marques de gagner beaucoup d’argent. Luca de Meo, patron de Renault, résume les choses ainsi au sujet de la Spring : « Là on avait dans les mains un produit à un coût intéressant, et qui nous permettait de satisfaire aux contraintes en termes d’émissions de CO2. Dans le calcul de l’équation économique d’une voiture comme la Spring, il faut aussi tenir compte des amendes que tu peux éviter avec de gros volumes électriques. Et en même temps, on peut offrir à des gens qui n’ont pas beaucoup d’argent la possibilité de rouler en électrique. On n’est pas là pour perdre de l’argent, mais il est clair que ce n’est pas avec Spring qu’on en gagnera beaucoup. »
Ce qui explique aussi pourquoi on ne voit pas venir grand-chose à l’horizon du côté des autres constructeurs, notamment allemands. Le cas de Volkswagen explique parfaitement cet état de fait. Dans une interview au Financial Times il y a quelques jours, le directeur financier de VW expliquait que son entreprise allait davantage se concentrer sur ses marges que sur la croissance de ses volumes de vente.
La raison tient en quelques chiffres : alors qu’en 2019, VW engrangeait 15 milliards de bénéfices en vendant 11 millions de véhicules, elle a gagné 20 milliards l’an dernier en écoulant 9 millions de voitures. La crise des semi-conducteurs, conséquence de l’épidémie de coronavirus, a en effet conduit le groupe à privilégier les modèles à plus forte valeur ajoutée, ce qui s’est montré extrêmement profitable. Et tant pis pour les besoins réels des automobilistes.
Les constructeurs chinois en embuscade
Dans une récente interview à Caradisiac, Michel Forissier, patron de l’ingénierie du groupe Valeo, équipementier de premier plan qui travaille avec tous les constructeurs, rappelait pourtant que les trajets du quotidien, qui représentent 90% des usages, ne nécessitent que des véhicules simples techniquement, dont la légèreté serait gage d’efficience énergétique.
Une puissance de 35 ch, bien sûr électrique, suffirait amplement. « «Il est inutile de verser dans une surenchère de puissance et de poids », expliquait-il. « Il y a un combat à mener pour la voiture électrique populaire. Il faut lutter contre ce tropisme de la montée en gamme. »
Au lieu de quoi les constructeurs nous proposent des SUV électriques toujours plus lourds et plus équipés, qui n’intéressent qu’une petite partie de la population.
On s'acheminerait donc vers la fin de la course aux volumes, avec des marques qui vont maintenant se concentrer sur le haut de gamme. Un véritable danger face à des constructeurs chinois qui eux ont compris tout l’intérêt de proposer des modèles peu chers, qu’ils ne demandent qu’à envoyer en Europe.
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