Et si Alfa Romeo devenait le ticket gagnant de Stellantis ?
Le vilain petit canard du groupe serait-il en train de se transformer en grand et beau cygne ? En tout cas, depuis plusieurs mois, la marque de Milan est en train de revenir dans la course, principalement grâce au petit SUV Junior. Décryptage d'un miracle à l'italienne.

Que n’a-t-on pas écrit sur la pauvre marque milanaise ? Et combien de fois l’a-t-on enterrée ? Alfa Romeo jouit d’une telle réputation de cancre dans l’automobile européenne qu’il a souvent été considéré comme la variable d’ajustement de FCA puis de Stellantis.
À chaque moment ou l’entreprise va mal, qu’il faut lâcher du lest et se débarrasser d’une marque, Alfa a tellement souvent été citée (avec Maserati), qu’à force, la sentence glisse sur le biscione comme les gouttes de pluie sur un pare-brise. La fiabilité douteuse qui a longtemps collé à la marque ? Pas grave. La montée en gamme vers le premium, laborieuse et moquée depuis la 159 ? Pas un souci. La comparaison, souvent abusive, avec BMW, qui posséderait le même ADN de sportivité chic, entretenue par les patrons d’Alfa eux-mêmes ? Pas un problème. Une gamme à la rue, obsolète et trop petite ? Pas de quoi s’affoler.
La marque enterrée trop tôt
Les ragots volent en escadrille, quant aux fans, beaucoup regrettent les Alfa d’avant, qui étaient des « vraies » Alfa. De quoi déprimer les dirigeants les plus costauds de la planète auto. Mais pas ceux d'Alfa Romeo. La marque ne plie pas, et se met en mode « vous allez voir ce que vous allez voir ». Un credo qu’elle nous sert depuis des lustres et que son patron Jean-Philippe Imparato a martelé, lors de son arrivée à Milan au moment de la reprise par Stellantis et qu’il n’a cessé de répéter jusqu’à l’instant ou il a quitté son fauteuil pour s’installer dans celui de directeur du groupe en Europe.
Évidemment, personne ne l'a cru et ses interlocuteurs affichaient un sourire poli en regardant ailleurs, en voyant une Giulietta hors d’âge restée trop longtemps au catalogue et en faisant la moue devant le SUV Compact Tonale, car « une Alfa, c’est pas ça ». Mais c’est quoi, au fait, une Alfa ? « C’est une Giulia » répondent les aficionados en extase devant cette auto, sans aucun doute la plus séduisante à conduire de toute la production actuelle.
Mais c’est une berline, née à une époque ou plus personne ne veut conduire d’auto basse, sauf les clients archi fidèles de la triplette premium allemande qui ne jurent que par leur BMW Série 3, Mercedes Classe C ou Audi A4. Alors la Giulia se vend mollement. Pas de quoi sortir la marque de l’ornière. Jusqu’au miracle que l’on n’attendait plus : le Junior.

Pourtant, en voilà une histoire mal partie, et une auto qui, au départ, n’avait pas ce nom passe-muraille, même si c’est une appellation déjà utilisée par Alfa. Car la Junior s’appelait Milano, jusqu’à ce que le gouvernement Meloni s’énerve et demande un changement de patronyme du petit SUV, prétextant qu’il n’est fabriqué ni à Milan, ni en Italie, mais en Pologne.
Et pourtant, malgré son nom pas terrible, malgré un segment, celui des SUV urbains ultra-embouteillé, un petit miracle s’est produit. Présenté il y a pile un an, il a décollé en douceur. Mais depuis quelques mois, le petit Junior a entraîné son grand frère Tonale vers la réussite.
Au mois d’avril, les ventes de la marque ont augmenté de 56 % en France, et de plus de 70% depuis le début de l’année. Elle atteint sa meilleure part de marché en Europe depuis 2020. Et plus de la moitié de ces ventes sont dues au Junior. Évidemment, quand on part de peu, comme Alfa Romeo, toutes les hausses sont spectaculaires. Mais tout de même : la marque suscite à nouveau un intérêt.
Pour l’expliquer, ses dirigeants invoquent une offre à la fois électrique et hybride. Certes, la stratégie de Carlos Tavares qui a toujours prôné des plateformes acceptant à la fois des moteurs thermiques et électriques porte ses fruits. On ne peut pas toujours se tromper. Mais le Junior n'est pas la seule auto à offrir ce type de motorisation variée, même si sa gamme est l’une des plus complète.
Un miracle milanais
Alors quel est le secret de cet engouement, puisqu’il est encore trop tôt pour parler de succès durable ? il est peut-être à chercher ailleurs. Dans le design, sûrement. Dans l’histoire de la marque, certainement. Alfa a beau être depuis longtemps le vilain petit canard de l’automobile européenne, personne ne lui a jamais dénié une volonté affichée : celle de tenter de produire des autos que l’on a envie de conduire, même si la marque s’est parfois sacrément éloignée de ce concept.
Alors à force de marteler que les Alfa des autos à conduire et pas seulement à vivre, ceux qui en ont marre de la fadeur de la production automobile ont fait le pèlerinage de Milan. Et le vilain petit canard pourrait peut-être, enfin, devenir un grand et beau cygne.
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