F1 avec Brad Pitt : des images en pole position, un scénario en fond de grille
Les images sont aussi bluffantes que l'histoire est insipide et trop souvent vue et revue. Pourtant, le film de Joseph Kosinski se laisse déguster. À condition de se contenter de vivre deux heures trente d'un incroyable spectacle, sans chercher d'autre motivation.

Quand une kyrielle de producteurs (dont Apple à hauteur de 150 millions) posent 300 millions de dollars sur la table, il faut que ça se voit et que soit rentable. Et en ce sens, F1, à peu près sur tous les écrans de France depuis le 25 juin, remplit parfaitement son contrat. Car les investisseurs ont recruté des pros du blockbuster pour les placer à la tête de l'affaire.
On retrouve notamment Jerry Bruckheimer, qui a produit la saga Pirates des Caraïbes, l’oubliable Jours de tonnerre sur la Nascar et les deux Top Gun. D’ailleurs pour mettre ce F1 en piste, il a pris moins de risques qu’un pilote, puisqu’il s’est entouré du metteur en scène Joseph Kosinski qui avait déjà officié sur Top Gun Maverick. Devant la caméra, Brad Pitt est toujours aussi crédible, aux côtés de l’impeccable Javier Bardem. Un sans-faute, donc, dans le genre.
Faut-il aller voir le blockbuster de l'été ?
Mais au-delà de son aspect financier parfaitement sur les rails, puisque F1 a réalisé le meilleur score de la semaine pour son premier jour d’exploitation et devrait rassemblement finir en pole des blockbusters de ce début d’été, est-ce que ses 2 h 36 valent les 11 euros d’un ticket payé plein pot ?
Techniquement, c’est le film de l’année. La sensation d’immersion n’a jamais été aussi intense. Kozinski a développé, avec Sony, des caméras super légères en Imax. En gros, ces gopros ultra ultra haute définition sont collées sur les véritables monospaces utilisées dans le film. Et le résultat est bluffant. On se retrouve au volant, au milieu des dépassements, mais aussi sur les vibreurs, dans le bac à sable et sur le visage en souffrance de Brad Pitt comme des autres pilotes.
On est immergé dans un Grand prix comme on ne l’a jamais été, et comme les vrais pilotes ne le seront peut-être jamais. En y ajoutant un montage qui sait ne pas abuser des plans trop courts, mode énervante de ces dernières années dans le cinéma spectacle, on obtient un film parfait.
D’autant qu’on est plongé dans les vrais paddocks, sur les vraies courses aux côtés des vrais pilotes, et notamment de Lewis Hamilton, qui a misé quelques sous sur le film, et surtout, a ouvert à l’équipe les portes de ce milieu fermé. C’est donc un film génial ? Presque.

Car une technique bluffante, si elle ne s’appuie pas sur une histoire qui l’est aussi, perd un peu de son âme. Et de ce côté, on s’aperçoit que les centaines de millions de dollars investis n’ont pas servi à payer les meilleurs scénaristes de Hollywood. L’histoire n’est pas bancale : elle est simplette. Sonny Hayes (Brad Pitt, 61 ans) est un vieux pilote sur le retour. À côté de lui, Fernando Alonso a des allures de stagiaire. Il a lâché la F1 après un gros accident et ne s’offre plus que quelques piges dans des sous-championnats.
Mais son vieux pote Javier Bardem va le rappeler pour qu’il reprenne le volant afin de sauver son écurie en passe d'être vendue. La suite on la connaît par cœur depuis Rocky Stallone Balboa qui, en 2006, nous offrait une énième version du vieux briscard sur le retour, du senior qui en a encore dans les gants, en l’occurrence sous le pied en ce qui concerne Sonny - Brad.
La régression a du bon
Le sexagénaire pilote, en mode sévèrement buriné, ne cache pas ses pecs, sa tablette de chocolat et ses tatouages pour en remontrer aux jeunots et prendre sous son aile, et se confronter au rookie de service, en l’occurrence un jeune pilote de la même écurie interprété par Damson Idriss. Inutile de divulgâcher la suite, son amour, forcément contrarié, avec une ingénieur et la fin, cousue du même fil blanc que celui que l’on utilise pour confectionner les combis des pilotes.
Faut-il, malgré cette faiblesse aller voir F1 ? Évidemment, mais à une condition : il faut laisser son cerveau d’adulte à l’entrée de la salle, plonger dans son sachet de pop-corn et dans ces images impressionnantes. Il n'y a plus alors qu'à redevenir ce petit enfant qui grimpe pour la première fois dans la voiture du manège en faisant "vrrrrroooom" et déguster le tout sans arrière-pensée. Un cinéma de régression, parfois c’est si bon.
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