GM, ce pionnier du turbo
Non, les premières voitures à moteur turbo de grande série ne sont pas européennes. Elles sont le fait de GM, qui a présenté les Chevrolet Corvair Monza Turbo et Oldsmobile 215 Jetfire en 1962.
Elle n’aura pas eu la vie facile, la pauvre Chevrolet Corvair lancée en 1960. Stigmatisée par Ralph Nader, qui a contribué à flinguer sa carrière, elle ne manquait pourtant pas d’intérêt. En effet, au début des années 60, GM jouait la carte de l’innovation et, inspiré par VW ou encore Porsche, a doté sa Corvair d’un moteur arrière.
Et, bien avant la 911, il s’agissait d’un flat-six 2,7 l tout alliage refroidi par air. D’une puissance initiale de 80 ch, il ne faisait de la Corvair qu’une entrée de gamme sympathique et bien dessinée (son design sera largement copié en Europe, par les Fiat 1300/1500 et NSU Prinz notamment), mais pas très rapide (135 km/h). Tout change au salon de Chicago en février 1962 quand on lui greffe un turbocompresseur Thompson, disponible dans sa version Monza. La puissance bondit à 150 ch, le couple à 315 Nm, ce qui permet à la petite Chevrolet de pointer à 170 km/h, tout en accrochant les 100 km/h en 10,8 s. Des performances alors très élevées !
Elle a beaucoup fait parler d’elle, cette Corvair Monza, avec ses chronos étonnants. Certains avancent même qu’elle a initié la mode des voitures populaires sportives aux USA. Il faut dire que dès 1965, sa cavalerie a crû à 180 ch dans la variante Corsa, spécifique à la Corvair restylée qui bénéficie de cardans à double articulation à l’arrière (remplaçant les bras oscillants du modèle précédents), améliorant la tenue de route. Hélas pour elle, cette Corvair plus musclée que jamais ne pourra rien contre l’avènement des Pony Cars, Ford Mustang en tête, plus simples techniquement et dotées d’énormes V8. Elle disparaît en 1966.
Un V8, l’Oldsmobile F-85 en disposait. Lancée en 1962, elle disposait d’un intéressant moteur tout en alliage relativement compact (3,5 l) selon les normes US. Celui-ci, quelques semaines après celui de la Corvair, en avril 1962, s’est équipé d’un turbo dans la version Jetfire de la F-85. Renommé Turbo Rocket une fois suralimenté, ce V8 produisait 215 ch, soit une hausse assez modeste face aux 185 ch du V8 à carburateur 4-corps de la F-85.
En fait, le constructeur avait fait en sorte que le moteur turbo se comporte de façon très proche d’un bloc atmo, la turbine entrant en action à à peine plus de 1 000 tr/min. Par ailleurs, cela a permis de ne pas renforcer les éléments internes du V8, au bénéficie du prix de revient. Seulement, pour limiter le cliquetis, il fallait tous les 400 km environ remplir un petit réservoir de « Turbo-Rocket Fluid », un mélange d’eau et d’éthanol à acheter chez son concessionnaire. Si on oubliait de le faire, le moteur se mettait en sécurité, désactivant sa suralimentation et réduisant drastiquement sa puissance.
Une contrainte que la clientèle n’a pas appréciée, même si la 215 Jetfire passait de 0 à 100 km/h en 8 s. Plus luxueuse et élégante que les autres F-85, la Jetfire manquait pourtant de puissance face à des concurrentes dotées de V8 bien plus gros. Elle tire sa révérence pour 1964, produite à près 10 000 unités. Sa remplaçante, plus imposante, recourra à un bien plus imposant V8 (5,5 l).
Ce n’est que bien plus tard que l’Europe s’intéressera au turbo, d’abord sur des versions exclusives (BMW 2002 Turbo en 1973 et Porsche 911 Turbo en 1975), le premier modèle de grande série n’arrivant qu’en 1978 : la Saab 99 Turbo.
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