Diesel défapés : alerte au contrôle technique.
C'est une petite bombe juridique qui explosera dans un an et demi. En janvier 2018, le contrôle technique mesurera la véritable pollution des diesel et devrait recaler à la pelle les diesel "défapés". Combien seront-ils ? Personne n'en sait rien. D'autant que nombre d'automobilistes ignorent que leur FAP a été retiré…
Dans mon billet du 18 avril, j'ai péché par naïveté : retirer le filtre à particules d'une voiture n'a rien d'illégal et la petite entreprise dont j'avais recopié la petite annonce en masquant ses coordonnées n'a donc strictement rien à craindre. Celui qui peut être sanctionné pour supression du FAP, c'est le propriétaire de la voiture. Les articles L. 318-4 et R. 318-1 du code de la route, prévoient une contravention de quatrième classe (la même que pour une omission de CT, soit 90 à 750 € en cas de comparution) voire, à la demande et sous la responsabilité du maire de la commune concernée et de l'officier de police judiciaire territorialement compétent, une immobilisation, une mise en fourrière du véhicule, voire son aliénation ou sa destruction. Évidemment, tout cela est très théorique et dans les faits, personne n'a jamais été sanctionné. D'autant que le très sommaire test de pollution du contrôle technique comme celui, pas plus fin, pratiqué en bord de route par les forces de l'ordre sont incapables de détecter cette modification.
Combien de voitures "défapées" ? Mystère…
Cela va bientôt changer. Non pas à partir du 1er janvier 2017 comme je l'écrivais, mais un an plus tard. Dans un an et demi, les centres de contrôle technique pratiqueront le nouveau test de pollution avec les nouveaux analyseurs 5 gaz dont ils sont censés être équipés depuis… le 1er janvier 2017. C'est que l'entrée en vigueur de la mesure a été repoussée d'un an ; les tests seront pratiqués, mais sans tenir compte du résultat. Pourquoi ? Parce que les pouvoirs publics veulent se faire une idée de la situation avant d'instaurer les limites d'émission au-delà desquelles la contre-visite sera obligatoire. Il n'est évidemment pas question de demander le respect des normes d'homologation européenne, d'abord faute de banc à rouleau et ensuite parce qu'on sait, depuis le scandale VW, dans quelles conditions improbables elles sont vérifiées. C'est donc en tenant compte des résultats moyens du parc mesuré que seront fixées ces nouvelles normes : comme au baccalauréat, il ne faudrait pas en recaler trop, ni trop peu...
Mais la statistique qu'attendent surtout les décideurs, c'est le nombre de véhicules "défapés" en circulation. Quelques dizaines de milliers ? Plusieurs centaines de milliers ? Personne n'en a la moindre idée sachant que cela s'est longtemps pratiqué sous le manteau avant de devenir une véritable branche de l'artisanat automobile. Sachant aussi que bien des propriétaires de ces voitures, les ayant achetées d'occasion, ignorent que leur échappement a été "opéré". Il est même probable qu'ils seront l'immense majorité car d'ici là, ceux qui ont fait retirer leur FAP se seront débarrassés de l'objet du délit.
Beaucoup de questions, aucune réponse.
C'est là que le dossier devient explosif : remettre un FAP neuf sur un diesel coûte jusqu'à plus de 2 000 €. Qui devra payer ? Le précédent propriétaire ou bien celui d'avant dans le cas d'un achat en troisième main ? Comment désigner avec certitude le responsable ? Comment prouver que l'ablation du FAP n'a pas été effectuée par un petit garagiste trop zélé "à l'insu du plein gré" du propriétaire pour résoudre une panne récurente ? Le petit garagiste ou l'officine spécialisée qui a pratiqué l'opération, comment l'attaquer en justice ? À quel coût et avec quelle chance de réussite ? Dans notre cas du mois dernier, l'entreprise garantit "sur facture" la réussite au contrôle technique, ce qui était vrai pour l'ancien contrôle mais ne le sera plus pour le nouveau. D'ici là, on peut parier qu'elle se sera évaporée… peut-être pour renaitre dans le commerce de FAP de seconde main. Faudra t-il se retourner contre le constructeur de la voiture au motif que son système de dépollution était à ce point inadapté à un usage urbain et provoquait de tels dysfonctionnements qu'il a fallu le démonter ? Ou attaquer les pouvoirs publics qui ont laissé les officines de défapage proliférer, avec pignon sur rue, inscription au registre du commerce et publicité et qui n'ont jamais communiqué sur l'illégalité du procédé? Cela promet de beaux débats devant la justice… Ou de nouveaux développements du système D, ou plutôt du système C, comme corruption même s'il sera moins simple de falsifier les résultats, ceux-ci étant directement transmis par l'appareil à l'organisme centralisateur.
La paix sociale avant la pollution de l'air.
Que décideront les pouvoirs publics s'il s'avère que 10, 15 % ou d'avantage des diesels à FAP se le sont vu retirer ? Obligeront-ils des dizaines ou des centaines de milliers de ménages à dépenser le tiers ou la moitié de la valeur vénale de leur auto pour la remettre en conformité ?
Je fais un pari : s'il s'avère que le défapage est un phénomène massif, ils adopteront la solution dite "pas de vagues" : les seuils de particules seront relevés de manière à ce qu'un diesel défapé réussisse le test pour peu qu'il ne soit pas trop mal réglé. La paix sociale sera préférée à la pollution de l'air.
Mais je peux perdre mon pari, auquel cas on assistera à d'étranges scènes dans les centres de contrôle technique et sans doute dans les tribunaux.
Dans cette hypothèse, et tant pis si je sors du cadre du billet d'humeur pour entrer dans celui du conseil pratique, il est urgent de faire passer la consigne : ne surtout pas acheter de diesel d'occasion sans avoir la certitude que celui-ci n'a pas été bidouillé. Un seul moyen pour le savoir, plus fiable que de se coucher sous la voiture à la recherche de cicatrices pas toujours visibles, faire passer la voiture convoitée à l'analyseur 5 gaz. Beaucoup de centres auto en sont désormais équipés, comme la plupart des concessionnaires et déjà certains centres de CT.
Le vendeur refuse ? Passez à l'annonce suivante…
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