La Dacia Sandero, voiture préférée des Français !

L'événement n'a pas fait beaucoup de bruit et pourtant, c'est un de ces petits faits qui marquent l'histoire d'un pays : l'an dernier, le modèle le plus acheté par les particuliers aura été la Dacia Sandero. Bien sûr, si l'on ajoute l'autre moitié du marché automobile - loueurs et entreprises - c'est toujours la Renault Clio qui truste la tête des ventes et la Sandero ne figure plus qu'en huitième place du vrai Top 10.

Ce score encore impensable il y a dix ans en dit long sur ce qu'est devenue l'automobile pour les Français. Long, mais quoi précisément ?

Que les Français se paupérisent et n'ont plus les moyens d'acheter autre chose que du low cost ? Qu'ils se désintéressent de l'automobile au point d'en faire une machine à se déplacer comme il y a des machines à laver le linge et d'autres à mixer la soupe ? Qu'ils ne veulent plus jouer au petit jeu du marketing et de la montée en gamme ? Qu'ils plébiscitent la simplicité et rejettent la sophistication souvent inutile dont se truffe désormais la moindre citadine ?

Sans doute un peu de tout cela.

Faut-il s'en féliciter ? Du point de vue de Renault, oui : les profits sont au rendez-vous et la Logan et ses déclinaisons ont permis à la marque d'enfin s'internationaliser. Même si c'est essentiellement dans les pays émergents et même si le nombre de Renault vendues en Europe a diminué d'un tiers depuis l'avènement de la roumaine.

Mais pas du point de vue de l'économie : aucune Dacia n'est fabriquée en France - si l'on excepte une partie de la mécanique - et pour le budget de l'Etat, le low cost signifie aussi low tax.

 Avec Dacia, le plaisir du "c'était mieux avant"

Personnellement, le succès des Dacia me laisse perplexe.

D'un côté, j'aime bien conduire ces voitures légères et sonores qui ne filtrent pas trop les sensations, des voitures saines et maniables au volant desquelles on s'ennuie moins qu'à celui de bien des hauts de gamme, lesquels sont souvent aussi moins confortables.

J'apprécie aussi cette philosophie du juste nécessaire, ce design simple et rationnel qui n'exprime ni orgueil ni agressivité, aux antipodes de celui des SUV, cette ergonomie évidente qui n'exige pas de lire le mode d'emploi pour mettre la radio ou la clim en marche. Conduire une Dacia, c'est éprouver le plaisir subtil et pervers du "c'était mieux avant".

Ajoutez à cela des garanties de trois ans, des tarifs transparents car sans rabais et une faible décote, on peut comprendre que tant de gens se laissent tenter.

Une sécurité trois étoiles…

 D'un autre côté, ça me désole. Pas facile d'expliquer pourquoi. S'il faut jouer à "de quoi le succès de Dacia est-il le nom ?" je répondrais d'abord la peur.

La peur d'acheter de l'occasion car le sujet renvoie à une question vieille comme les Lada : pourquoi ne pas préférer, pour le même prix, une voiture de moyenne gamme récente, voire très récente et encore garantie ? Comment peut-on dépenser 14 870 € non négociables dans une Sandero Stepway alors que pour le même prix, en marchandant ferme ou sur le site d'un mandataire, on trouve, au choix, une Citroën Cactus de six mois ou un an à peine rodée, des citadines neuves bien plus modernes ou une familiale de deux ans ? Par trouille de se faire avoir, manque de confiance en soi et en autrui car acheter une voiture d'occasion, c'est d'abord avoir confiance.

Mais la peur n'éloigne pas le danger…

D'abord, les Dacia sont-elles si fiables ? Il parait que oui, des palmarès en attestent et la simplicité de conception comme le choix d'éléments anciens par la marque mère plaident pour cela. Hélas, d'autres classements - ceux de l'ADAC (l'automobile-club allemand) notamment - démontreraient le contraire avec des Dacia plus souvent en panne. D'ailleurs, on voit mal comment la mécanique et l'électronique des Renault, souvent mal classées dans ces enquêtes, s'amélioreraient par le miracle du low cost. 

Et il faut voir comment vieillissent les premières Logan et Sandero, entre plastique du volant qui se délite au soleil, sièges qui exhibent leur mousse, banquette arrière baladeuse, peinture dont le vernis s'envole au vent et soubassement rouillé.

Ensuite et surtout, une Dacia c'est trois étoiles aux crash tests euroNcap, à l'exception précisément de la Sandero 2 qui en a glané quatre.

Mais il est inutile d'opposer ces arguments aux adeptes des Dacia parce que, bien souvent, il ne s'agit plus d'adeptes mais de fidèles, voire de croyants, comme il y en a de la Toyota Prius ou de la Citroën C15. Des fidèles qui se targuent d'un achat rationnel - le mot clé de la marque - mais deviennent parfois imperméables aux arguments rationnels. Ce n'est pas le moindre exploit de la marque.