2. Porsche Taycan Sport Turismo GTS (2021) – Sur la route : une insulte aux lois de la physique
Notre essai de la Porsche Taycan Sport Turismo GTS démarre par une cinquantaine de kilomètres de voie rapide à Majorque, direction le nord où se trouvent les plus belles routes de l'île. Cela permet de se familiariser avec la voiture et surtout de se convaincre qu'effectivement, comme Porsche l'affirme, il y a bien de la polyvalence non seulement avec cette carrosserie, qui offre bien plus de visibilité arrière avec sa lunette plus large et latérales en comblant une bonne partie des angles morts, mais aussi dans cette version. Certes, notre modèle d'essai reçoit notamment en option les suspensions pilotées PDCC à 3 300 € aux réglages spécifiques mais le résultat est bluffant de confort sur cette première portion, avec une fermeté sans excès. Le silence qui règne à bord est aussi étonnant (si l'on met en veille évidemment le système de sonorisation artificielle) que ce soit en matière de bruits d'air ou de roulement et ce, malgré les pneus en 265 à l'avant et 305 à l'arrière. Malgré une largeur proche de deux mètres sans les rétroviseurs et une position de conduite très basse, la Taycan ne se montre absolument pas non plus intimidante et on trouve très vite ses marques.
C'est aussi le moment parfait pour pratiquer un peu d'écoconduite, que ce soit par goût pour la discipline ou pour économiser au maximum de la capacité de batterie pour en profiter plus tard. Et la Taycan répond déjà très bien à cet exercice. En mode « Range » le plus efficient, nous avons ainsi obtenu une moyenne de 11,7 kWh/100 km sur précisément 54,1 km, bien aidés par une roue libre tout simplement extraordinaire semblant trouver partout des faux plats descendants. On peut décider d'ajouter de la régénération au lever de pied mais cela manque cruellement de niveaux et de puissance, sans parler évidemment de l'absence de palettes qui iraient pourtant extrêmement bien de part et d'autre du volant pour changer à la volée l'intensité de la récupération d'énergie. Sur un trajet mixte et en conduisant sans trop se soucier de la consommation, 400 km d'autonomie réelle semblent en tout cas parfaitement atteignables.
Mais c'est le moment d'attaquer la partie amusante dans le sens traditionnel du terme en matière d'automobile : la montagne et ses lacets. Et dès les premiers virages, on oublie autant que l'on se rappelle. Les presque 5 mètres de long, les 2 310 kg sur la balance, les places arrière, le grand coffre et son hayon, autant de données qui disparaissent. A l'opposé, l'équilibre parfait, la motricité sans faille et la direction précise et communicative font plus qu'évoquer l'ADN de Porsche, celui qui fait de la marque une référence en matière de plaisir de conduite depuis des décennies.
En matière de suspensions, la maîtrise est totale et tient presque de la sorcellerie : pas besoin d'une sécheresse excessive pour une conduite dynamique enthousiasmante, ainsi aucune percussion ne remonte dans l'habitacle ou ne vient perturber l'équilibre mais le roulis en courbe se limite au strict minimum, bien aidé par le centre de gravité extrêmement bas apporté par l'implantation des batteries. Aucune correction au volant n'est nécessaire, on inscrit la GTS dans sa courbe puis on réaccélère progressivement pour s'en extraire puissamment. Trop tôt sur la pédale de droite et le train avant élargit légèrement à titre d'avertissement, trop fort et c'est l'arrière qui se décale gentiment pour signaler sa présence. Tout est d'une transparence incroyable, ce qui permet à des conducteurs de tous niveaux de s'amuser, et l'option des roues arrière directrices à 2 352 € achève de donner une agilité et une maniabilité, au ralenti comme à hautes vitesses, qui tient plus de la sorcellerie que de l’ingénierie.
En conduisant des électriques, on remarque vite que les chiffres de couple et de puissance ne se ressentent absolument pas de la même façon que dans une thermique du fait de leur caractère instantané. C'est déjà vrai pour une Volkswagen e-Up ! de 83 ch et 212 Nm dont les accélérations se montrent étonnamment vigoureuses alors imaginez seulement quand on a presque 600 ch et 850 Nm sous la pédale… De quoi affranchir totalement la Taycan de la notion de gravité ou d'inertie qui passe d'une vitesse nulle à une à trois chiffres en un claquement de doigts pendant lequel on a pourtant le temps de sentir ses yeux s'écarquiller et d'atteindre le point d'inconfort en matière de pression sur la cage thoracique, avant la transmission enclenche distinctement son second rapport pour relancer un autre tsunami tout aussi vertigineux. Et cela vaut à l'accélération comme au freinage : Porsche n'a pas l'habitude de faire les choses à moitié pour tempérer l'enthousiasme débordant de ses mécaniques et la Taycan n'y fait pas exception avec d'infatigables étriers et disques au format XXL : respectivement six pistons et 390 mm à l'avant, quatre pistons et 358 mm à l'arrière.
Est-ce que l'on ressent une différence au volant entre berline et break ? Absolument pas et pour cause : l'empattement reste le même, les performances sont identiques au dixième près et la masse supplémentaire à emmener se limite à seulement 15 kg, un détail face à la masse totale. On perd par contre quelques points de polyvalence face à la Cross Turismo dont les 20 mm de garde au sol supplémentaires permettent une conduite plus sereine au quotidien au moment de franchir un ralentisseur ou d'attaquer une rampe de parking. Avec un tel empattement et un porte à faux avant généreux, le silence à bord des Taycan en berline ou en Sport Turismo peut en effet être régulièrement troublé par le bruit glaçant d'un frottement du soubassement.
Pour la partie circuit, Porsche a fourni des berlines GTS avec l'option des freins à disque en céramique reconnaissables à l'étrier jaune.
Porsche faisant bien les choses, une petite session sur le circuit Mallorca Llucmajor était organisée pour que l'on puisse véritablement voir ce que cette Taycan GTS, en version berline, a dans le ventre mais c'est au final plus le pilote d'un jour qui avoue ses limites bien avant. Les vitesses de passage en courbe sont physiquement désagréables sur une piste pourtant totalement détrempée et les freins, ici ceux en céramique à 9 012 €, semblent encaisser sans transpirer malgré la masse. C'est véritablement une voiture magique. De façon plus générale, est-ce que c'est vraiment le pied d'emmener une électrique sur circuit ? C'est en fait une expérience étrange et déroutante où l'on constate plus que jamais que le bruit, les rapports ou le régime moteur des voitures thermiques sont des éléments extrêmement importants permettant de savoir sans même réfléchir à quelle vitesse on est. Ici, dans le silence mécanique le plus absolu, il faut forcément garder un œil sur le compteur pour connaître précisément sa vitesse en entrée de courbe, histoire d'arriver à faire la différence parfois bien mince entre un glorieux passage à la corde ou une traversée de bac à sable direction les pneus.
Photos (113)
Sommaire
Déposer un commentaire
Alerte de modération
Alerte de modération